La maison kabyle est la même partout. Il n'y a pas de cour extérieure, mais un patio autour duquel deux parties viennent s'articuler : l'une sert d'habitation au paysan pauvre et à sa famille, qui s'y entasse car la progéniture est nombreuse. Cette partie de la maison est une longue pièce étroite. L'autre partie sert à abriter l'âne qui sert à tirer la charrue, porter les charges, et sur lequel la femme du paysan va jusqu'à la source puiser l'eau. Le paysan lui-même l'utilise pour aller au marché hebdomadaire, avec ses maigres marchandises. En plus de l'âne, l'appentis abrite une vieille araire archaïque et des instruments rudimentaires.
La pièce habitable s'utilise pour tout faire. La femme du paysan y prépare la cuisine, roule le couscous, file la laine et tisse les tapis aux motifs extraordinaires, durant les terribles nuits de l'hiver kabyle, pendant lesquelles tout le monde se serre, à la lueur d'un quinquet fumeux.
Dans la même pièce, la marmaille turbulente s'ébat joyeusement à même le sol en pisé mais couvert de nattes, ces tapis peu épais qui sont l'apanage des familles pauvres en Algérie. C'est là aussi que les poules et les chats vivent en liberté totale et en coexistence pacifique, ambiguë certes, mais réelle, grâce à l'autorité de la maîtresse de maison.